Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





29 décembre 2012

Un nouveau triptyque pour l'Archipel et l'action de la France ?


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Accepter la géographie de son pays n'est pas une chose si aisée. Bien des personnes se complaisent à croire que la France est un hexagone. D'autres répondent que les « territoires français d'Europe » forment, effectivement, une telle figure géométrique à six côtés. Mais, poussant plus loin le regard sur la carte, ils ne peuvent s'empêcher de montrer que la France est un Archipel présent sur tous les océans ou presque (manque l'Arctique), sur tous les continents ou presque (manque l'Asie). Le barycentre de cette construction politique (et même démocratique car bien des îles ont voté une fois, voire deux fois, leur rattachement à la France) serait l'île de la Réunion.

Nôtre construction géographique nationale, qui s'est donc faite aussi bien par le sang et les larmes que par la bulletin de vote, est donc un Archipel entouré par maints océans et maintes mers. Qui plus est, notre assise principale se situe sur un continent, l'Europe (même si notre plus longue frontière terrestre est en Amérique du Sud). Bien des soubresauts ont fait que la construction de cet archipel dépendait de la préservation du socle français en Europe des invasions, des menaces et surtout de l'encerclement. La menace des Habsbourg se matérialisera à nouveau à l'issue de la Bataille de France de 1940 quand l'Allemagne avait envahi la moitié Nord du pays, l'Italie tentait d'entrer par les Alpes et Espagne et Angleterre nous étaient hostiles pour diverses raisons. La seconde guerre mondiale une fois achevée, et la Guerre froide révolue, une première historique se produisit : grâce à la paix, grâce à la construction européenne, gage de paix, la France s'est construite une insularisation artificielle en Europe. A la manière des longs murs de l'Antique Athènes, l'Archipel France a achevé d'être entièrement maritime quand la menace continentale européenne a disparu à la chute du Mur de Berlin.

Cette construction géographique suppose une défense. Là, c'est une exigence constitutionnelle1. Héritage des dynasties royales qui ont gouverné la France, la Révolution n'a en rien enlevé au chef d'Etat républicain la responsabilité, plus que de défendre les intérêts de la France et des français, le soin de préserver l'intégrité territoriale du royaume, puis de la République. Cette dernière est une et indivisible.
Et pour Défendre la France, Paris a à sa disposition plusieurs forces armées :
  • la Gendarmerie nationale2 (huit siècles d'histoire),
  • l'Armée (de Terre, dont l'histoire remonte à la levée d'une armée royale permanente sous Charles VII au XVe siècle),
  • la Marine nationale (remontant à Richelieu (XVIe siècle, ou à moins qu'il ne faille remonter au XIVe siècle et la Guerre de Cent ans),
  • l'Armée de l'Air (1934).
Ces quatre forces armées principales se sont organisées de diverses manières au cours de l'Histoire afin de préserver tout ce qui était Franc, puis France.

A l'heure actuelle, et donc depuis la chute du Mur de Berlin, il s'agit d'articuler ces forces pour ne plus se défendre contre une invasion continentale, mais bien pour porter le glaive là où la menace apparaît. En effet, si les dangers ne sont plus aux frontières, ils n'ont pas pour autant disparus. Qui plus est, il s'offre alors deux choix :
  • soit se replier géographiquement sur l'Archipel ou, pire, sur les seuls territoires français d'Europe,
  • soit de s'attaquer au centre de gravité des crises qui apparaissent pour éviter qu'elles dégénèrent, voire de les étouffer.
Après trois livres blancs (1972, 1994 et 2008), et bientôt un quatrième (2013), et une pratique de l'usage de la force assidue depuis 1945, il apparaît clairement que la défense en avant est un choix constant en France. Qui plus est, il s'est mêlé depuis 1945 les guerres de décolonisation avec celles, plus ou moins officielles, plus ou moins clandestines, destinées à la protection de nos intérêts de part le monde (non pas que les guerres de décolonisation ne concernaient pas nos intérêts). Dans cette perspective, il y avait un triptyque qui était utilisé :
  • la diplomatie de défense (initiée par la signature des accords et partenariats de défense avec nombre d'anciennes colonies africaines).
  • le prépositionnement des forces de par les colonies,
  • le positionnement d'un contingent lors d'un conflit déclaré.

Bien entendu, cette disposition ne plus durer : les colonies ne sont plus et le prépositionnement des forces a été revu à la baisse, souvent plus par raisons budgétaires que par choix. La réduction de notre voilure territoriale en Afrique n'est pas sans conséquence sur nos modes d'actions. Par exemple, l'entretien du 2e Corps d'Armée en Allemange (force de réserve de l'OTAN) se produit peu de temps après la fin de presque toutes les indépendances de nos colonies. Les moyens qui lui étaient adjoints pour assurer son action étaient adaptés à une action centre-européenne. En plus, en France, les processus militaire, économique et politique font que le matériel choisit l'est pour toutes les unités, souvent. Un décalage est apparu et s'est alors élargi au fur et à mesure des décolonisations et de la réduction de voilure en matière de prépositionnement. La profondeur d'action allouée au 2e Corps d'Armée, ce n'est pas la même échelle que la projection ou le déplacement d'unités en Afrique. Si bien que de 1962 à 1978, la mobilité de nos forces ne fera que se confronter à des bases de moins en moins nombreuses pour une allonge presque inchangée en matière de projection aérienne, entre autre exemple. Un appareil comme le Transall est d'une utilité certaine pendant l'opération Manta (1983-1984) au Tchad :
  • pour relier l'aéroport de Ndjamena aux forces déployés,
  • mais certainement pas pour relier cet aéroport à la métropole où il faudra faire appelle aux gros porteurs des compagnies sous pavillon national et étrangers.

Il manquait là un avion de charge au rayon d'action stratégique. Tout comme la détention pendant ce conflit par les forces françaises envoyées au Tchad de missiles balistiques de courte portée à charge conventionnelle (système Pluton), aurait été une menace à prendre en compte par Tripoli contre ses bases aériennes (du contournement de la puissance aérienne) et concentrations de forces (le pouvoir libyen soutenait alors les forces adverses).

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© Inconnu.

C'est justement dans cette problématique que nous trouvons l'Archipel France : il y a la nécessité absolue (à moins de violer la Constitution) de préserver l'intégrité du territoire national. La Guerre des Malouines nous donne une démonstration effroyable de ce que cela signifie :
  • quand l'archipel britannique de l'Atlantique Sud était envahi à la « surprise » générale,
  • la Prime minister craignait une action espagnole contre Gibraltar.
Plus généralement, en dehors de ce « devoir premier de l'Etat » comme disait le général De Gaulle, il y a nécessité de préserver les îlots d'intérêts français de par le monde.

De tout cela, il découle que la défense l'Archipel France suppose que :

Les unités de ces forces armées sont dispersées à travers l'Archipel France. Il s'agit donc de parvenir, pour agir, à résoudre le problème de la concentration qui agite les stratèges depuis Sun Tzu ou Sun Bim jusqu'aux penseurs contemporains (soit 2500 ans de réflexions). L'économie des forces de Foch nous enseigne une leçon bien utile à la plasticité qui est exigée par la stratégie de l'action (général Beauffre) menée depuis un Archipel :

« Le principe de l'économie des forces, c'est au contraire l'art de déverser toutes ses ressources à un certain moment sur un point ; d'y appliquer toutes ses troupes, et pour que la chose soit possible, de les faire toujours communiquer entre elles, au lieu de les compartimenter et de les affecter à une destination fixe et invariable. Puis, un résultat obtenu, de 1es faire de nouveau converger et agir contre un nouveau but unique ».

C'est pourquoi, au final, il faut pour défendre l'Archipel France un front mêlé de vaisseaux, d'aéronefs et de régiments, dispersés à travers tous les territoires de France. Lorsqu'une crise survient, ils doivent pouvoir, à partir de leurs structures d'actions et de forces, pouvoir concentrer le volume de forces et de feu à l'épicentre de la crise. Cet exercice exigeant, car d'ampleur mondial, appelle donc à un nouveau triptyque :
  • diplomatie de défense,
  • prépositionnement « fixe » des forces, soit les bases sur le territoire national (qui peut se trouver à la jonction de la préservation de nos frontières et de nos intérêts à l'étranger) et celles entretenues à l'étranger,
  • le prépositionnement « dynamique des forces ».

La diplomatie de Défense permet d'entretenir des forces étrangères à des volumes et niveaux qui doivent nous permettre, indirectement par un allié, dissuader toutes tentations de déstabiliser un état de fait qui nous est favorable. C'est un ensemble de travaux qui a été le fait des unités de l'action clandestine pendant un temps. Puis, ce sont les forces spéciales qui ont héritées de ce type de missions5. Mais, les hommes de l'action clandestine comme ceux des actions spéciales font face à des tâches qui dépassent leur maigre volume de forces car unités d'élites. C'est pourquoi il serait plus judicieux, selon la pensée des auteurs d'un rapport fait pour l'IRSEM sur la formation des forces armées étrangères6, de confier ces formations à des unités conventionnelles. Celles-ci, détentrices de savoir-faire très spécifiques (du parachutage des forces à l'action amphibie) auront le volume nécessaire pour le faire (et ainsi décharger les unités aux missions très spécifiques précitées). Les unités conventionnelles bénéficieront de retours d'expériences et de la possibilité à démultiplier leur forme de forces grâce à cette capacité à s'injecter dans une armée alliée (là où les coalitions de circonstance sont d'une solidité toute relative).

Le prépositionnement fixe de nos forces permet de raccourcir, par leur déconcentration, les délais pour les mettre en œuvre. Cela nécessite un savant maillage de nos bases, les matériels nécessaires pour les relier entre elles (d'où le passage du Transall à l'A400M) et suffisamment d'hommes et de femmes pour armer ces points. Le dosage est particulièrement exigeant puisqu'il faut pouvoir dégarnir ponctuellement plusieurs bases pour en renforcer une ou créer un point d'action. C'est ce qui se passe pour, avec une grande réactivité, constituer une force française de manœuvre en République Centrafricaine.
Généralement, la concentration réactive des forces prépositonnées passent par l'assaut vertical.

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L'avenir des forces amphibies est-il à la constitution de groupes constitués autour d'un BPC et d'une unité navale mêlant capacités amphibies et logistiques, à l'instar du Karel Doorman néerlandais ?

Le prépositionnement dynamique des forces est une chose nouvelle. Il s'agit d'utiliser des groupes navals de la Marine, non pas pour constituer une ceinture dynamique de « forts mobiles » pour préserver nos frontières, mais bien pour créer de véritables bases flottantes donc mobiles servant à la projection de forces. Ce n'est ni plus ni moins qu'une base, mais qui est capable de se mouvoir d'un point à l'autre du globe. Cette souplesse permise par la mer sert aussi bien à renforcer le dispositif de bases ou à combler un manque que, et c'est tout aussi important, de s'affranchir des contraintes imposées par l'adversaire. C'est tout l'intérêt du groupe aéronaval, par exemple, mais aussi de l'action du Tonnerre pendant la crise ivoirienne. Le navire amphibie permettait d'entretenir des forces aéromobiles en mer dont l'action ne pouvait être entravée par les institutions ivoiriennes, comme celles de la Force Licorne.
Si le temps de la mer est long, la possibilité de positionner ces forces au large de la crise permet donc de raccourcir le délai d'intervention. L'assaut peut être autant horizontal (opération amphibie) que vertical (offensive aéromobile via les hélicoptères de manœuvre (d'où les craintes liées aux déficits en la matière).
La maîtrise de ces opérations nécessitent un tel savoir-faire qu'il existe un corps dédié à l'amphibie aux Etats-Unis par exemple : l'US Marines Corps. Des voix se font entendre pour proposer une réforme des Troupes de Marines afin d'aller dans ce sens.

La concentration des forces dans l'Archipel exige donc cette plasticité pour détendre nos unités aux endroits judicieux pour préserver le territoire national et nos intérêts jusqu'au moment où il faut tendre le dispositif vers un point de concentration.
La Marine tient une place particulière puisqu'elle trouve dans ce dispositif son rôle historique de préservation des voies de communication (navales mais aussi aériennes, spatiales et cybernétiques), mais avec l'Armée de l'Air, elle partage les missions de projections de puissance et de forces vers la Terre. Si la puissance navale peut aider à forcer obtenir la décision en réduisant la liberté de manœuvre de l'adversaire ou en le tournant, ce sont bien les forces terrestres qui vont la chercher, cette décision, à terre.



1 "La Marine nationale, première force armée garante de l'intégrité territoriale de la France", le Fauteuil de Colbert, 30 août 2012.
2 "Archipel France : action combinée entre Marine et Gendarmerie", Pas d'argent, pas de Suisses pour le Fauteuil de Colbert, 13 décembre 2012.
3 " La question de la base française au Niger cache-t-elle celle de l'avenir de l'Armée de Terre ?", le Fauteuil de Colbert, 1er août 2012.
4 "L’insécurité peut-elle ruiner l’essor des outre-mer ?", une tribune du CE Romain Champenois", Lignes de Défense, 14 décembre 2012. 
5 " La France et les opérations spéciales", Eric Dénécé et Nicolas Warney, ISC.
6 " Réinventer notre diplomatie de Défense – Faire autrement pour faire faire", Georges-Henri Bricet des Vallons & Nicolas Mazzucchi, Alliance Géostratégique.

26 décembre 2012

L'objectif du combat naval est-il la destruction du navire adverse ?



Animation Flash


Il va être tenté de répondre à cette question par un survol de l'histoire des combats navals. Tout survol est forcément incomplet et emprunte des raccourcis qui peuvent donner l'impression de la contradiction. Cet écueil n'est pas forcément erroné puisque pour répondre correctement à cette question, il faudrait réellement effectuer ce voyage et les prises de position ou les constatations ne manqueraient pas d'évoluer.

Néanmoins, et ces prudences prises, un retour en arrière dans l'histoire des combats navals peut amener tout à un chacun à être surpris par un constat simple : envoyer par le fond le navire adverse, c'est très compliqué. Pire, quand c'était à portée, cela n'était pas non plus une volonté assumée et achevée puisque la perte du navire, même adverse, signifie potentiellement la perte d'un éventuel gain stratégique (les trésors du navire) et de son équipage. Et même la perte de l'équipage adverse tout entier, ou celle de nos équipages, n'est pas un fait assumé. Pourquoi donc le « choc » a été préférée au « feu » pour en finir lors d'une bataille bien souvent, ou plutôt, pourquoi le feu est-il d'un usage si modéré en mer ? Les possibilités du feu ne sont pas entièrement exploitées. Ce qui en amène au sujet du jour : en quoi, après le schéma qui va être dessiné, les armes à énergies dirigées permettent de poursuivre la recherche de certains buts, dans une certaine continuité historique.

Depuis l'Antiquité jusqu'au début du XIXe siècle, les galères furent utilisées par bien des marines. L'historien Philippe Masson n'hésite pas à écrire que ce fut un "règne interminable". Dans l'un de ses ouvrages, "De la Mer et de sa Stratégie" (aux éditions Tallandier), il décrit la place des galères dans l'Histoire et les marines, pourquoi elles perdurèrent, pourquoi elles disparurent.

La galère est un navire fin, élancé, rapide et non-ponté. Elle est l'expression matérielle du milieu où elle est appelée à naviguer : les mers fermées ou étroites. C'est-à-dire des mers sans vents ni courants réguliers, et sans marées. Grâce à ses deux modes de propulsion, elle peut aussi bien se passer du vent qu'en profiter. Ce n'est pas un mince choix pour un navire qui servira dans des mers où il n'y a pas de vents dominants. Ces derniers déterminent plus ou moins bien les routes navigables dans l'Océan. Mais dans les mers étroites ou fermés où ces vents dominants sont absents, le navire le plus utile est celui qui est le moins soumis aux aléas d'Eole.

In fine, c'est l'idée de la manœuvre qui transparaît puisque, sans évolutions nautiques, il n'est pas possible de manœuvrer. La dualité de la propulsion (qui perdure de nos jours sous d'autres formes) permet ces évolutions, et donc, de manœuvrer. C'est l'avantage essentiel et millénaire de la galère. Cependant, cette manœuvre est très exigeante : à travers les descriptions qui vont être faites de l'évolution matérielle de ce navire, il va être possible d'apprécier la difficulté à manœuvrer ce navire, voir ces navires en formation de combat. C'était un art que la mise en œuvre des galères.

En contre-partie à ces avantages, il faut dire que la galère n'était pas le moyen le plus indiqué pour la navigation hauturière dans l'Océan. Il faudra attendre la Galéasse.

Les premières utilisations militaires des galères se basent sur l'attaque à l'éperon. Il s'agit alors essentiellement de trirèmes et de birèmes. La manœuvre est si exigeante que Philippe Masson dit bien que l'on ne peut s'étonner qu'à partir de l'époque hellénistique l'abordage prenne le pas sur l'éperonnage. Il faudra attendre l'arrivée de la poudre pour voir une autre forme de combat supplanter l'abordage.

Ce changement de tactique se transpose dans la construction des galères. L'abordage est ou non préparé par des tirs d'artilleries : balistes ou catapultes. Celle-ci, l'artillerie navale, sera presque toujours basée à l'avant des galères. Le besoin d'une artillerie plus lourde se transpose mécaniquement par des navires plus lourds. Cet accroissement du tonnage et de la taille permet une meilleure tenue à la mer, ce qui n'est pas pour déplaire à l'artillerie, et permet la possibilité d'embarquer une plus grande compagnie d'abordage.

Les romains perfectionnent la technique grâce au covus: une passerelle rabattable dotée de grappins. Le covuss'abattait sur les navires adverses. Dès lors, la manœuvre se cantonne de plus en plus à aborder l'adversaire de la meilleure manière pour développer un combat "terrestre" à son bord. Il ne s'agit plus de manoeuvre le navire dans l'optique de couler l'autre par lui-même.

Le meilleur compromis matériel est trouvé par les byzantins avec les dromons. Navire relativement léger et rapide, doté de 50 avirons de chaque bord répartis en deux rangées superposées. Il met aussi bien en œuvre un éperon que des armes de jet.

Le dromon se combine avec l'utilisation du feu, voire du Feu : c'est-à-dire le feu grégeois. Son invention est attribué à Callinicus et son apparition daterait de 670 après Jésus Christ. L'arme incendiaire se compose de salpêtre, d'huile de naphte, de souffre ainsi que du bitume. La particularité de ce mélange, c'est qu'il brûle, même au contact de l'eau... L'œuvre de Georges R. R. Martin, « Games of Thrones » a été portée à l'écran sous le contrôle de son auteur sous la forme d'une série télévisée. La fin de la deuxième saison s'achève notamment sur une bataille navale. Son objet est la capture de la capitale de l'union des royaumes par le prétendant légitime. Mais surtout, le défenseur de la capitale, lord Tyrion, utilise le feu grégeois à travers une galiote. La vidéo n'emprunte peut être pas toutes les rigueurs du travail de l'historien, mais elle peut donner un aperçu de ce qu'était le feu grégeois pour le combat naval...

Mise en oeuvre au combat

La galère est un navire offensif. La strucutre du navire impose certaines tactiques car tout l'armement du navire (éperon, catapultes, balistes et canons) demeurera presque toujours exclusivement à l'avant. De fait, une présentation classique au combat semblera toujours se diviser entre une préparation d'artillerie et l'abordage. A plusieurs reprises dans l'histoire navale, l'éperonnage aura été pensé, tenté et utilisé. Mais la manoeuvre est tellement exigeante, et dangereuse (venir à bout portant d'un feu qui finira par être capable de décimer un pont entier de marins) qu'elle aurait du couler assez vite dans les oubliettes de l'histoire.

Les galères ne peuvent se présenter qu'en ligne de front ou en formation triangulaire. L'exercice est exigeant pour tenir ces formations.

Le combat naval s'apparente trait pour trait au combat terrestre :
  • les flottes se structurent avec un centre et deux ailes. L'une d'elle est généralement appuyée à la côte.
  • Lors de l'abordage, il s'agit d'un combat au corps à corps.
Il faudra attendre la bataille de Lépante pour voir apparaîre une autre forme de combat où le canon deviendra l'arme principal pour couler les navires adverses.

En attendant celui-ci, la guerre navale ressemblera à une sorte de manœuvre générale où il s'agira d'aborder au mieux, de près ou de loin, les navires afin d'imiter la guerre terrestre. La capture du navire adverse deviendra même un des points cardinaux des habitudes de la guerre navale au temps des vaisseaux. Au temps des galères, il fallait aborder le navire adverse pour aller décimer son équipage, faute d'autres tactiques pour en venir à bout. Au temps des vaisseaux, la chose se déroulait parfois dans la même idée, non pas car il n'était pas possible de faire autrement, mais parce que, et contrairement aux galères, la construction d'un vaisseau était suffisamment longue et coûteuse en ressources pour considérer comme avantageux la prise du navire ennemi.
Au Moyen-Âge

La galère perdure jusqu'à cette époque. Aucun navire n'a encore pu la supplanter dans ces mers sans vents dominants. Il y a très peu d'innovation matérielle pour ce navire antique. C'est la propulsion qui se trouve améliorée avec l'adoption de la nage a zenzileau XIIIe siècle (trois rameurs décalés actionnent à partir du même banc trois avirons). A la fin de l'ère médiévale, c'est la nage scalaccioqui prend le relais : entre 5 et 7 hommes actionnent la même rame. C'est cette disposition qui perdurera jusqu'à la fin des galères : moins de rames, armées par plus d'hommes.

Le canon fait son apparition à bord des galères à partir du milieu du XVe siècle. Il sera une arme redoutable à leur bord, notamment à la bataille de Lépante (1571), mais il signera la mise à mort des galères quand il fut installé par rangées entières à bord des vaisseaux de ligne, percés de sabords.

Sur le plan militaire, la Galéasse apparaît au XVIe siècle selon Philippe Masson -"De la Mer et de sa Stratégie". Ce navire hybride est la dernière évolution d'un navire plus que millénaire : la galère. Cette tentative de conjuguer les avantages de la galère et des précurseurs du vaisseau fera merveille dans premier temps, en Méditerranée.

C'est une hybridation car il s'agit d'améliorer un navire qui se fait lentement mais surement déborder par les précurseurs du vaisseau. Sous de multiples formes, celui-ci commence à imposer sa domination navale aux autres utilisateurs de la mer. Les cogghe, puis les caraques, et enfin les galions (qui sont une évolution de la caraque) menacent définitivement le règne des galères. C'est l'artille navale portée par ces nouveaux venus qui menacent les galères : portée latéralement, elle accroit considérablement le nombre de bouches à feu à bord d'un navire -ce qui offrent accessoirement de nombreuses et nouvelles possibiltiés de manoeuvre et d'engagement.

Cette nouvelle disposition de l'artillerie n'apporte pas une puissance de feu théorique, mais bien réelle. Par exemple, à la bataille de Preveza (1538), le Galion de Venise résiste à l'attaque de plusieurs galères turques pendant une journée entière. Bien plus tard, en 1684, le vaisseau français Le Bon, un 50 canons, commandé par le compte de Relingue, brise pendant cinq heures l'assaut de 35 galères espagnoles. L'historien Philippe Masson ajoute dans son ouvrage qu'un vaisseau hollandais de 56 canons, La Licorne, sera capturé à l'abordage par six galères sous le commandement du français La Pailleterie, en Mer du Nord. Loin de réhabiliter la galère, cet engagement ne mettait en exergue que l'avantage de la rame quand il n'y avait pas de vent, et l'avantage historique d'équipages entraînés face à un équipage improvisé.

Dès le début du XVIe siècle, la galère ne peut qu'apparaître comme menacée. Elle est faite pour le combat singulier, et, définitivement, elle ne pourra plus jamais (sauf exceptions) venir à bout d'un adversaire conçu dans le Nord de l'Europe et portant une artillerie latérale.

Gênes et Venise, les deux grandes puissance navales de la Méditerranée, se doivent de réagir à cette remise en cause matérielle de leurs forces par les puissances maritimes montantes du Nord de l'Europe.

Pour parvenir à cette fin, il s'agit donc d'adapter aux galères ce qui permettra aux vaisseaux de les supplanter définitivement : l'artillerie navale fondée sur les canons. Depuis l'Antiquité, les galères embarquent de l'artillerie : catapultes, balistes, divers engins incendiaires et, enfin, des canons. Cette artille qui sert essentiellement, dans l'Histoire, à préparer les abordages, n'est installée qu'en chasse, c'est-à-dire à l'avant du navire. Dans cette partie se trouve de trois à cinq bouches à feu, dont la plus grande est généralement surnommée le coursier. Problème majeur, l'arrivée des différents navires nord-européens introduisent une artillerie latérale. Fatalement, à dimensions égales, le nombre de bouches à feu est bien plus importante à bord des navires du Nord plutôt qu'à bord des galères qui se trouvent très limitées dans l'emport de bouches à feu.

Loin d'abdiquer, la galéasse modernise considérablement son genre :
  • premièrement, la coque est arrondie à la poupe comme à la proue, à la manière des cogghe. Par ce biais une meilleure tenue à la mer est recherchée.
  • Deuxièmement, le navire est plus haut sur l'eau, ce qui s'accompagne d'un tirant d'eau augmenté.
  • Troisièmement, des châteaux sont érigés à l'avant et à l'arrière du navire, à la manière des carraques. Il En ce qui concerne le château arrière, la domination de l'adversaire par la hauteur est recherchée car la guerre sur mer est encore une guerre terrestre où s'affronte des forteresses flottantes. Et donc, l'avantage va aux archers et aux arbalétriers plus hauts sur l'eau que leurs adversaires. Mais surtout, le château avant sert essentiellement à porter une artillerie nombreuse, en plus de celle qui est généralement installée en chasse.
  • Quatrièmement : installation d'une artillerie navale dans les flancs du navire. C'est là le principal apport des navires du nord qui tranchent foncièrement de la galère par cette artillerie latérale.
Cependant, la Galéasse ne s'émancipe peut être pas suffisamment de la galère. Elle garde une propulsion à deux modes, ce qui semble indiqué pour les mers étroites et fermées sans vents ni courants dominants. Ce qui peut surprendre, surtout, c'est que le navire conserve un éperon. Le fait de porter cet arme n'était peut être pas une tradition très coûteuse. Mais cela relève une ambivalence dans l'utilisation militaire de la galéasse : ses concepteurs ne choisirent pas entre le choc et le feu.

Choix d'autant plus dommageable car la galéasse semble taillée pour le feu, justement. De facto, dès la mise à l'eau des galéasses, il y a un distingo à faire entre deux guerres navales :
  • la guerre navale héritée de l'Antiquité où un ensemble de plateformes navales manoeuvrent pour aller chercher le choc entre elles, et donc l'abordage. Souvent, la manoeuvre des galères, et d'autres navires, est semblable aux manoeuvres terrestres. En mer, il y eu également un centre encadré par deux ailes. Ce qui revient à dire que le combat entre navires ou entre équipages semble être une transposition de ce qui se fait à terre.
  • La guerre navale qui émerge grâce aux navires du Nord de l'Europe (caraque, galion, vaisseau) où le nombre de points de comparaison avec la guerre terrestre va tendre à disparaître au fil des siècles. L'abordage devient une méthode de combat tout à fait secondaire. C'est le feu qui domine, et l'on manoeuvre moins pour aborder le navire adverse afin d'aller en décimer l'équipage plutôt que pour immobiliser, voir pour le détruire. Sa destruction mettra quelques siècles à devenir un objectif préférable à sa capture.
A la bataille de Lépante (1571), c'est par l'utilisation du feu que la galéasse fera merveille. Il y aura à cette bataille la distinction entre le navire du feu, la galéasse, et celui du choc, de la mêlée, la galère.

En tout les cas, la création de la galéasse permet de renouveler intelligemment la galère en transposant les avancées de l'artillerie navale provantn des puissances navales montantes du Nord de l'Europe. La conservation des deux modes de propulsion de la galère permet aussi de conserver à cette hybridation, pendant un temps, des capacités manoeuvrières supérieures. Cependant, l'hybride ne prendra pas quand il s'aventurera dans des milieux qui ne sont pas les siens. Bien malheureux seront ceux qui feront quitter la galéasse de la Méditerranée pour l'emener affronter les caraques, galions et autres vaisseaux sur un terrain pour lequel ils ont été conçus. L'hybride n'était conçu que pour son milieu. En dehors, il était obsolète, et pire, il était moins bon que l'un (la galère) ou l'autre (caraque, galion) de ses parents. Dans l'Océan, la galéasse cumulait les défauts et perdait ses avantages.

Apogée au XVIIe siècle

L'apogée. Une galère ordinaire mesure 47 mètres de longueur, pour 6 de large et 2 à 3 mètres de tirant d'eau. Par rapport à la trirème antique, la croissance a été modérée (contrairement à l'époque de la vapeur). Le tonnage dépasse 250 tonnes (quand des séries entières de torpilleurs déplaçaient 50 et 77 tonnes).

Concernant la propulsion, les voiles latines se généralisent à leur bord (les galères en portent deux). Ce type de voiles est particulièrement bien adapté à la navigation dans les mers étroites et fermées car elles étaient plus pratique pour remonter au vent. Le navire avance aussi grâce à 25 paires de rames. Celles-ci sont actionnées par une chiourme de 250 hommes.

L'équipage comprend également 120 matelots qui sont dédiés à la manoeuvre et à la navigation. Ce qui tendrait à montrer que, par rapport à son équivalent antique (et ses 13 matelots), faire naviguer une galère du XVIIe siècle est un exercice bien plus complexe. Il y a toujours un corps d'hommes uniquement dédié à l'abordage.

L'éperon cède presque définitivement du terrain car il cède la place à une quille. Celle-ci supporte une plateforme triangulaire qui doit faciliter l'abordage.

Autre chose intéressante à relever, la galère s'est diffusée : elle n'est plus cantonnée à la Méditerranée, mais elle navigue également en mer Rouge, mer du Nord, dans la Baltique et dans la mer des Antilles.

Disparition des galères

Entre le XVIIe et le milieu du XVIIIe siècle, la majeure partie des galères sont retirées des marines. Certaines iront jusqu'à connaître le XIXe siècle. Il faut dire que fasse aux ponts garnis de sabords et de canons, les frêles galères perdraient toute mobilité après une bordée de fer dans leurs rames. Cette disparition donne même lieu à un échange géographique de témoin : la méditerranéenne galère cède la place au vaisseau du nord-européen.

Qui plus est, le feu grégeois disparaît avec les navires à rames. L'empire Byzantin aura emporter son secret. Ou presque car un certain Antoine Dupré en aurait rapporté la formule à la cours de Louis XV en 1759. Le roi ne choisit pas d'utiliser l'arme qui aurait donné pendant un « certain temps » un avantage monstrueux à la France dans la guerre sur mer. Après tout, il semblerait que personne n'avait réussi à enlever le secret du feu grégeois aux byzantins.



Avènement du vaisseau

Les galères, dromons et galéasses laissent place à des navires plus adaptés aux exigences de la navigation hauturière. Il y a une période transitoire où les deux types de navires vont cohabiter, soit entre le Xe siècle (apparition des cogues) et le XVII (voire le XVIIIe siècle de manière très épisodique). Ce navire qui nous vient des mers du Nord de l'Europe se transformera pour devenir la « nef », soit le vaisseau qui nous est si familier dans les guerres navales allant du XVIIe au XIXe siècle. C'est bien la capacité à emprunter l'Océan qui consacre ce changement de sceptre entre galère et vaisseau, mouvement appuyée par les grandes découvertes. Mais le fait que, l'architecture des vaisseaux est plus apte à l'emport de pièces d'artilleries en quantité et en lourds calibres qui achève la transmission.
Les guerres napoléoniennes consacrent le navire de ligne à trois ponts (soit trois batteries couvertes) qui est le roi des mers. En réalité, et comme l'auteur de « Trois ponts » peut nous l'apprendre, la place de ce type de vaisseau de ligne dans les flottes des XVIII et XIXe siècle est finalement assez marginal. C'est le navire de ligne à deux ponts qui est le roi des mers, et les guerres, de l'indépendance américaine jusqu'à celles de l'Empire (peu ou prou la période décryptée par Mahan et Corbett), montrent, démontrent la supériorité de cette formule architecturale sur l'autre.
Trois ponts expliquait la chose ainsi : le trois ponts est lourd, peu manœuvrant, lent. Qui plus est, sa batterie basse, celle portant les plus lourdes pièces d'artillerie, est la plus proche de la ligne de flottaison : à chaque fois que la mer est trop mauvaise, elle n'est pas utilisée. Tandis que le vaisseau à deux ponts, il a fini par porter deux batteries couvertes de canons au même calibre, aussi important que ceux de la batterie basse d'un deux ponts. La batterie du deux ponts étant assez haute au-dessus du niveau de la mer, elle peut toujours servir. Le navire étant dans l'ensemble plus manœuvrant, il peut se mesurer avec grands avantages face au trois ponts.

A travers l'arrivée des navires à vapeur, il faut distinguer deux grandes révolutions navales :
  • la propulsion à vapeur,
  • les obus explosifs.
La propulsion à vapeur est une Révolution Totale dans la stratégie navale. Depuis la nuit des temps, le navire ne pouvait se mouvoir que par la force des bras ou selon la bonne volonté des vents (d'où le fait de consacrer à ceux-ci un dieu est bien occupé par les prières des marins). Depuis que les bouches à feu se sont imposées à bord, elles ont pris la place des rameurs, ne restait plus alors que le vent. Ce dernier était une servitude incroyable dont on peut peiner à se rendre compte. Celui qui avançait avec un vent favorable pouvait espérer remporter la victoire puisqu'il avait l'énergie nécessaire à la manœuvre pour déborder et/ou enrober son adversaire, ou, au contraire, se dérober. Certains vents dominants étaient même de véritables obstacles invisibles pour espérer prendre le dessus sur un adversaire. Tourville ne peut pas profiter de sa victoire à la Hougue (1692) contre les anglais pour faire passer l'escadre à Brest ou St Malo. Une partie de ses navires ne dépassent pas le Cotentin faute de vent, donc faute d'énergie nécessaire, et la victoire de veille devient défaite. C'est pourquoi le port de Cherbourg existera, mais trop tard.

Mais depuis que la propulsion à vapeur existe, les navires ont découvert une liberté de mouvement totale ! Les nouvelles servitudes furent le charbon et le pétrole... Mais elles s'effacèrent, presque, devant l'énergie nucléaire.

Les obus explosifs "à la paixhans" (XIXe siècle) permettent de faire ce que l'on ne faisait pas ou plus (assertion qui renvoie directement à l'introduction et aux prudences énoncées) depuis le feu grégeois : couler des navires. Cela pouvait se produire, mais l'impression renvoyée par le récit des batailles est que cette finalité était trop difficile à atteindre.

Du XVIe au XIXe siècle, avant les obus explosifs, il était plus intéressant de "tirer à démâter" : c'est-à-dire que par diverses munitions et tactiques, il était question de faire tomber la mâture ennemie afin d'immobiliser le navire. Bordée par bordée, celui-ci pouvait encaisser nombre de coups sans broncher... tandis que l'équipage de faisait littéralement déchiqueter par les échardes qui s'échappaient de la coque. L'arrivée des caronades montra même encore une fois qu'il y avait un plus grand intérêt à annihiler l'équipage plutôt que de chercher à détruire le navire.

L'un des moyens de destruction était le brûlot : c'était une embarcation chargée d'explosifs. Tout le sel de la manœuvre consistait à réussir à faire approcher la bombe flottante du navire adverse en difficulté : c'est tout l'enjeu du livre d'un certain lieutenant de vaisseau Castex qui exposait que le feu devait désarmer le navire adverse (ce qui sous-entend que, en mer on arme des navires par des hommes, et que le feu agit en conséquence) pour ouvrir une brèche dans le dispositif afin que la galiote approche avec sa funeste mission.
La construction d'un navire trois ponts pouvant consommer de 2 à 2500 chênes et représentant une fortune colossale, il était relativement courant de chercher à capturer le navire adverse. C'était un moyen aisé pour étudier les techniques et technologies de l'adversaire, et pour augmenter sa propre flotte au détriment du perdant.
Finalement, c'était là une ligne traditionnelle du combat naval : depuis l'Antiquité jusqu'à cette époque, il était plus simple de "désarmer" le navire adverse (car il faut des hommes pour armer un navire) plutôt que le couler. Il était alors :
  • soit question de capturer le navire,
  • soit de le détruire par divers moyens.

Alors, quand les obus explosifs arrivent, les tactiques navales évoluent considérablement : quand il s'agissait plutôt de capturer le vaisseau ennemi, avec les obus à la Paixhans la destruction devient plus qu'envisageable. Et comment faire ? Le vaisseau est mû par la vapeur : il n'est plus question de tirer à démâter. Dès lors, une chose formidable se produit : le premier qui commence à toucher l'autre prend l'avantage au cours du combat. Et la propulsion à vapeur offre toutes les qualités requises pour avoir la liberté de manœuvre.

Finalement, Mahan ne fait que baigner dans cette époque où le fait naval va de révolution en révolution, tant sur le plan de la liberté des mouvements que sur des possibilités tactiques qui sont offertes. C'est à croire qu'il se focalise excessivement sur ce creuset où se réunissent des innovations alors que l'histoire navale montre d'autres pratiques. Par exemple, le feu grégeois n'a pas été diffusé de part le monde : si le secret l'explique en partie, il faudrait peut être avancer une absence de volonté pour se le procurer. Il n'est donc pas étonnant que l'amiral américain cherche à démontrer que pour obtenir le commandement des mers, il faut réussir à détruire la flotte adverse. La « bataille décisive » pourrait être un anachronisme qui se lit à travers le prisme des technologies de la seconde moitié du XIXe siècle et qui sert à regarder ce qui se faisait avant.
Le cuirassé Dreadnought n'est que l'accomplissement de l'idée la manœuvre pour détruire le navire adverse : tout les organes, ou presque, du navire sont tournés vers la mise en œuvre d'une batterie principale constituée de pièces du même calibre dont l'objectif est de détruire l'adversaire.

Ce que l'on pourrait oublier souvent, c'est que la propulsion à vapeur permet également l'émergence du torpilleur et du sous-marin. Ce sont deux types de navires qui vont considérablement perturber la constitution des flottes, et dès lors, il ne s'agira plus simplement d'accumuler un grand nombre de vaisseaux de ligne pour emporter la guerre navale, mais bien d'atteindre les buts de la guerre, malgré les systèmes de forces de l'adversaire.

Le porte-avions n'est que la continuation du cuirassé par ce plan là puisqu'il permet d'élargir l'horizon des armes en adaptant la puissance aérienne à la mer. Il n'y a pas de systèmes d'armes qui ait un horizon plus éloigné.

Quelque part, le sous-marin est le nouveau Dreadnought puisque les sous-marins d'attaque, en particulier, sont entièrement tourné vers la destruction de l'adversaire. C'est bien le premier qui entend (et non pas qui voit l'autre depuis la fin des submersibles dans les années 50 du XXe siècle) l'autre qui prend l'avantage. La torpille, par ailleurs, n'est pas une arme au feu gradué : dès qu'elle atteint sa cible, cette dernière a peu de chance de réchapper de la destruction. Le sous-marin d'attaquer pourrait alors apparaître comme l'aboutissement de la recherche de la destruction du navire adverse par le feu.

Autre sous-marin, autres destructions, le Sous-marin Nucléaire Lanceur d'Engins (S.N.L.E.) pourrait lui aussi être un autre Dreadnought : la portée de ses armes est intercontinentale et le feu nucléaire signifie autant destructions que terreur. Ce navire là s'attache plus à chercher à produire un effet sur terre : ses armes dépassent la seule recherche de l'obtention de la décision.

Mais ces deux vaisseaux noirs là atteignent le paroxysme de l'utilisation du feu dans la guerre navale : si l'efficacité dans la destruction de buts navals et terrestre est « totale », elle amène dans une impasse. Effectivement, le général Bauffre décrit la guerre comme étant un affrontement de deux volontés opposées (dialectique). Les deux belligérants n'ont que faire d'une monde purifié par le feu nucléaire, ce qui écarte le cas du SNLE dans les développements suivants.
Le sous-marin d'attaque pose bien des difficultés : s'il est désormais possible de couler la flotte adverse, est-ce souhaitable ? Il ne faudrait pas faire mentir l'Histoire : bien des guerres, bien des batailles ont vu des navires être emportés corps et biens par la mer sous les assaut de l'adversaire. Mais la capture tenait une grande place. La bataille de Lépante (1571) voit un « anéantissement » de la flotte turque, juste assez efficace pour qu'elle soit reconstruite en quelques mois. La guerre des Malouines voit le HMS Conqueror torpiller le croiseur Belgrano. Si les argentins pleurent l'orgueil de leur marine, cela ne cacha pas que le spectacle d'un équipage livré au feu et à la mer cruelle n'en provoqua pas moins un certain malaise en Grande-Bretagne. Les anglais se souvinrent peut être à cette occasion de l'émotion gigantesque produite quand le cuirassé Bismark envoya par le fond le HMS Hood : après quelques échanges de salves de 380mm, le Hood explose depuis l'une de ses soutes à munitions. Il y avait 1200 hommes d'équipages : il n'y aura que trois survivants. Si l'Argentine n'en avait pas les moyens, l'Angleterre de Churcill put se livrer à une fureur navale sans pareil pour exécuter l'ordre du Politique : « sink the Bismark ! »

Ce que l'on peut en retenir, c'est que, s'il est possible de détruire la flotte adverse, c'est au risque de provoquer une chose qu'il n'est nullement possible de réaliser : la montée aux extrêmes, décrite par Clausewitz. L'humiliation d'une défaite, qu'elle soit la perte d'un fleuron ou d'une flotte, est un puissant moteur de la revanche qui peut aller au-delà des intérêts du pays. Le sous-marin est binaire, par exemple : soit il détruit, soit il ne détruit pas. Le Politique ne peut se satisfaire d'un tel manque de souplesse, pour ne pas dire de subtilités. Ce qui explique pourquoi, d'une certaine manière (et encore une fois trop rapide) la guerre littorale prend un tel essor, pourquoi la guerre aérienne au servir des flottes ou permise par les flottes devient de plus en plus souple et pourquoi, enfin, le sous-marin produit autre chose que de la destruction de masse comme du renseignement et des opérations spéciales.

Les armes navales doivent permettre de peser sur la volonté de l'adversaire, pas de la raidir totalement à toute solution négociée.

Le cycle initié par les canons à la Paixhans, la torpille et le missile se termine peut être. Si jamais tel était le cas, alors il faudrait ne pas exclure totalement la destruction. Mais la possibilité de capturer tout ou partie des forces adverses redeviendrait un but à atteindre. La construction des navires -qu'ils naviguent sur ou sous l'eau- prend tellement de temps et de ressources que capturer ceux de l'adversaire pourrait être un gain stratégique non-négligeable. Ils peuvent permettre de gagner du temps ou de récupérer celui que l'on perdait vis-à-vis des avancées technologiques de l'adversaire : n'est-ce pas ce que l'Iran a fait en prétendant capturer au moins un drone américain, qui pourrait être un RQ-170 Sentinel ? Que ne fait pas la Chine en ayant rachetée des porte-avions occidentaux envoyés à la casse ?

Mais s'il fallait viser la possibilité de capturer et de faire des prisonniers, dans le but d'avoir de quoi négocier sur le plan politique sans provoquer une montée aux extrêmes, alors il faut des outils pour le faire. Les armes à énergies dirigées sont certainement ces outils.
Première chose, les flottes sont reliées à la terre sur des distances planétaires grâce au centre de gravité spatial. Une arme electro-magnétique bien dirigée et contenue dans une enveloppe géographique bien délimité pourrait permettre d'isoler un groupe naval adverse.

A ce moment là, l'assaillant, armé de navires de surface ou de sous-marins, pourrait achever de les isoler par divers outils : laser contre moyens optroniques, armes électromagnétiques, micro-ondes, etc... A la manière du feu des bordées, les navires seraient réduit au silence. L'équipage en subirait encore les effets : il serait la victime collatérale des dégâts que l'on cherche à infliger au vaisseau pour l'immobiliser.

L'abordage redeviendrait un art périlleux.
Imaginer qu'il y ait un état de belligérance intermédiaire entre les escarmouches para-militaires et la guerre de haute intensité serait, paradoxalement, un facteur de « paix » en Asie du Sud-Est. En effet, dans cette région du monde, les volontés s'affrontent, mais les moyens physiques non-cinétiques et cinétiques de la non-belligérance pour ce faire s'épuisent : au-delà, c'est la dangereuse montée aux extrêmes.

Au final, il y aurait bien à gagner à parvenir à cet ancien but de la guerre navale qui pourrait devenir « moderne » : la capture des navires. Pour l'un ce serait le moyen de gagner en savoirs, pour l'autre de contrôler ce que l'adversaire maîtrise réellement comme savoir. Même si aborder ne sera pas à la portée de tous (mais la guerre navale n'a jamais été un sport de masse).

Renforcer la puissance navale française ? La nouvelle frégate Gloire, entre cuirasse et armes électromagnétiques

© DCNS.

Les armes à énergie dirigée promettent quelques applications pratiques très intéressantes en matière de combat naval. Nous tentons de présenter une remise en perspective du combat naval où la question posée est : couler le navire adverse est-il l’objectif ? La tentative de réponse oscille entre le « il a fallu attendre que ce soit possible techniquement » et le « politiquement ce n’est pas forcément souhaitable ». Bien entendu, une perspective aussi sommaire ne peut qu’être insatisfaisante.

20 décembre 2012

2022 : vers une contribution navale à la DAMB ?

© Inconnu. Sea-based Anti-Ballistic Missile Intercept System.


C'est par une information de Mer et Marine du 11 décembre qu'il convient de se replonger dans l'évolution de la défense aérienne de la Flotte. Ainsi, il faudrait comprendre que l'état-major de la Marine planche sur les évolutions à apporter pour que, d'une part, les frégates Cassard et Jean Bart puissent aller au bout de leur service sans subir d'obscolenscences majeures, et que, d'autre part, le porte-avions n'en subissent pas non plus, en raison des mêmes causes. C'est-à-dire que le vénérable radar de veille aérienne DRJB-11B (qui équipaient ou équipent les trois navires mentionnés) arrive en fin de vie et ne correspond plus aux standards actuels.


18 décembre 2012

« Les sous-marins d’attaque dans l’action navale »

     Le Centre d’Études Supérieures de la Marine (CESM) et l’Institut de Recherche Stratégique de l’École Militaire organisait le 18 décembre 2012 de 14h à 17h30 à l’École militaire, un colloque intitulé « Les sous-marins d’attaque dans l’action navale ». 

13 décembre 2012

Archipel France : action combinée entre Marine et Gendarmerie


© Gendarmerie nationale.
Outre-mer, la Marine effectue un spectre de missions éclectique et multiforme, car il s'agit de pallier bien des insuffisances d'infrastructures ou d'organismes qui peinent à y assumer la totalité de leurs attributions.
La Gendarmerie est dans le même cas.

09 décembre 2012

"Introduction à la Cyberstratégie" d'Olivier Kempf


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Les infrastructures cybernétiques pénètrent le quotidien des hommes depuis longtemps. Il est assez difficile de trouver une date à cette ère puisque il y en a pour la faire remonter au temps des câbles télégraphiques. Quoi qu'il en soit, depuis le XIXe siècle, ce que l'on a coutume de nommer le cyberespace est une dimension prégnante de l'action humaine.

Dans ce milieu, des actions y sont menées à toutes fins : d'abord et surtout économiques, puis "stratégiques", mais pas seulement. Le cyberespace est devenu un milieu à part entière et tout milieu suppose une stratégie qui lui est propre. qiconque s'intéresse aux affaires mondiales n'a pu râter avec quelle ampleur le cyber s'est imposé dans les préoccupations stratégiques depuis quelques années. Cela fait quelques années que c'est un sujet de vives attentions : le cyberespace était entré trop discrètement dans le livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008, et il y fera une entrée en force dans celui de 2012. Que s'est-il passé entre ces deux dates ? Les attaques massives dans le cyberespace de 2007 contre l'Estonie et la guerre de Géorgie ont été deux éléments déclencheur d'une prise de conscience supplémentaire.

Mais de quoi la cyberstratégie est-elle le nom ? C'est à cette question que répond magistralement l'auteur d' "Introduction à la cyberstratégie", le stratégiste Olivier Kempf (Egeablog). Dès le début de son ouvrage il brosse le portrait d'un sujet mal connu. Il est possible de sortir trois des points majeurs de l'ouvrage pour mieux le présenter :
  • qu'est-ce que le cyberespace ?
  • En quoi le cyberespace permet-il à nouveau l'expression d'actions stratégiques offensives ?
  • En quoi l'arme cybernétique est-elle limitante ?

Première grande action, l'auteur nous offre une définition de ce milieu. Il part des quelques définitions officielles qui existent (celles de l'ANSSI et du CICDE) pour nous montrer qu'elles sont insuffisantes pour englober toute la complexité de ce milieu. Par exemple :
  • la première définition ("l'espace de communication constitué par l'interconnexion mondiale d'équipements de traitement automatisé de données numérisées") ne prend en compte que des considérations techniques : le cyberespace ne serait qu'un milieu virtuel naissant de l'interconnexions de réseaux de toutes sortes ?
  • La seconde définition, quant à elle (le cyberespace est "un domaine global constitué du réseau maillé des infrastructures des technologies de l'information (dont Internet), des réseaux de télécommunications, des systèmes informatiques, des processeurs et des mécanismes de contrôle intégrés. Il inclut l'information numérique transportée ainsi que les opérateurs des services en ligne"), conserve elle aussi cet aspect technique central mais l'ouvre également à une donnée essentielle, et non moins centrale : le cyberespace sert à transport de l'information.
Le cyberespace serait donc la conjonction, d'au moins, deux éléments centraux : les infrastructures physiques et l'information qui y transite. De là, l'auteur nous propose d'aborder le cyberespace selon une approche en couches :
  • la couche matérielle qui est constituée des infrastructures proprement dites et qui permettent d'interconnecter des machines qui ont vocation à communiquer entre elles ;
  • la couche logique qui recouvrent tout ce qui donne vie à ces machines (algorithmes, logiciels, programmes, etc...) et leur permettent d'utiliser leurs "organes" pour leur faire produire les travaux que l'on attend d'elles ;
  • la couche sémantique ou informationnelle qui renferme toute l'activité humaine dans le cyberespace se quantifiant en informations échangées ou produites.
Partant de là, le stratégiste nous fait remarquer que si dans la grande tradition technologique américaine (voir "La technologie américaine en question - le cas américain" de Joseph Henrotin aux éditions Economica) la première couche intéresse au plus point à Washington, il s'agit de remarquer que la Russie, comme la Chine, est plus sensible à la troisième couche. Mais les positions évoluent.

Toujours selon le propos de l'ouvrage, il faudrait voir le cyberespace comme une nouvelle sphère stratégique qui viendrait théoriquement se superposer aux premières :
  • terre,
  • mer,
  • air,
  • électromagnétique, 
  • nucléaire,
  • exospatial,
  • et le cyberespace.

Fruit de différentes caractéristiques, ce milieu est novateur car il est l'un de ceux qui permettent à nouveau la manœuvre stratégique offensive depuis la fin de la Guerre froide. Celle-ci se fait dans l'intérêt de la puissance politique qui l'emploie, et plus particulièrement, elle se fait aussi bien contre l'ennemi que contre l'allié qui peut se révéler adversaire.

La caractéristique majeure, que l'auteur souligne à maintes reprises, qui ouvre la voie à l'offensive stratégique est la très difficile imputabilité des actions dans le cyberpespace. La Russie n'a pas été reconnue officiellement comme étant l'instigatrice des attaques contre l'Estonie ou la Géorgie...

C'est-à-dire qu'il est possible de se soustraire à l'attention des diverses servitudes (diplomatie, médias, opinions publiques, etc...) qui entravaient l'action stratégique afin d'agir dans ce milieu pour y produire des effets aussi bien en son sein que dans d'autres. Si le cyberespace attend une guerre propre (comme tous les autres milieux), il sert aussi à en produit dans l'inter-milieu.

En ce sens, il offre une nouvelle corde à l'arc des acteurs en recherche de liberté. En la matière, les actions sous-marine et des forces spéciales étaient les dernières cordes à l'arc des Etats. Après tout, et comme le souligne Olivier Kempf, l'objet de la stratégie est de gagner des marges de manœuvre pour agir contre l'adversaire (bien que comme il le souligne dans son avant-dernier ouvrage la cyberstratégie doit s'accomoder une dialectique qui s'efface au profit d'une polylectique). La posture de défense serait bien dépourvue face aux attaques puisqu'elle ne peut que tenter d'y parer selon différentes configurations (défense étanche, en profondeur ou dynamique), mais sans pouvoir découvrir l'identité de l'assaillant.

Toutefois, la difficile imputabilité des actions dans le cyberpesace est inversement proportionnel à l'importance des actions offensives que l'on souhaite y mener : plus l'effet recherché de l'action est coercitif, plus sa discrétion sera moindre. C'est-à-dire qu'au delà d'un certain degré de violence des attaques, l'imputabilité ne sera plus possible. Il y a une auto-régulation dans le fait de permettre à nouveau l'offensive stratégique.

Enfin, il convient d'aborder rapidement la notion de cyberarme. Objet de tous les fantasmes, elle aurait la vertu de l'arme nucléaire : le pouvoir égalisateur de l'atome. Grisé par les réussites d'hackers isolés, on a pu prophétiser que l'action cybernétique se ferait au détriment des Etats et à peu de frais. Hors, il en est rien. Ainsi, la quantité de moyens à mettre en mouvement pour atteindre un but est proportionnel à ceux qui sont mis en œuvre pour le défendre. Cela revient à dire que pour attaquer une cible durcie par un groupe ou un Etat, il faut des moyens équivalents à ceux utilisés pour durcir la cible. Il n'est donc pas à la portée du premier venu de s'attaquer à l'un des Etats qui a une base industrielle et technologique de communication acérée. Par contre, l'inverse est vrai : la différence de potentiel de forces entre les acteurs fait que ceux en bas de l'échelle sont plus susceptibles de subir les assauts de ceux qui appartiennent au haut de l'échelle.

Mais l'usage des cyberarmes est malaisé :
  • d'une part, il n'y a pas de cyberarme générique. Ainsi, elle est conçue et dimensionnée en fonction de la cible. Il n'est donc pas possible d'improviser une attaque.
  • D'autre part, pour pouvoir mener des actions offensives grâce aux propritétés du cyberespace il convient de rester discret afin de rester en deça du seuil duquel l'imputabilité de l'action cybernétique demeure.
Pour infiltrer un dispositif ennemi, il convient alors de s'ingénier à utiliser les possibilités de l'intermilieux. C'est l'exemple typique du vers Stuxnet qui a frappé la centrale iranienne de Bucher et qui a été conçu grâce à des complicités internes, donc à une ou des actions clandestines.
Mais il y a une dernière grande limite à l'utilisation de cyberarmes : elle révèle le savoir-faire de l'arsenal qui l'a conçu. Si cette arme est de nature à inquiéter les autres acteurs alors c'est la voie ouverte à une course aux armements puisque toute puissance politique souffre comme d'une atteinte contre son existence le fait de ne pas pouvoir supporter la comparaison avec une autre qui détiendrait un avantage déterminant. La course à l'arme nucléaire fut irrésistible de part le monde...

http://www.egeablog.net/dotclear/public/.Couv_intro_cyber_m.jpg
Ces trois caractéristiques majeures de l'arme cybernétique fait qu'il est mal-aisé de l'utiliser : les Etats-Unis étudièrent l'utilisation d'une de leurs armes contre la Libye avant d'abandonner l'idée de le faire pour ne pas révéler l'état de leurs capacités. Oui, l'action offensive cybernétique qui a pu être observé renforce la défense puisqu'elle sait à quoi se préparer. Mieux, pour se prémunir des attaques, la défense doit préparer l'offensive, et donc les cyberarmes, pour savoir à quoi s'attendre et ne pas se laisser surprendre...

L'ouvrage est une réussite puisque c'est bel et bien une introduction à la cyberstratégie. Après sa lecture, il est possible de sortir partiellement du brouillard de la Guerre et de mieux appréhender ce nouveau milieu. Ainsi, les différentes strates apparaissent du cyberespace, ses acteurs et ses manières d'agir y apparaissent et la pensée s'en fait plus claire.

On ne saurait mieux vous en conseiller la lecture si vous souhaitez appréhender ce nouvel espace sans y perdre votre latin et, pourquoi pas, aller plus en avant dans le détail pour comprendre toutes les subtilités dans lesquelles se nichent les enjeux.

Il conviendra de revenir un peu plus en avant sur les enseignements de l'ouvrage et tenter de voir en quoi l'action cybernétique ressemble comme deux gouttes d'eau à l'action du sous-marin nucléaire.