Les @mers du CESM


Les @mers du CESM - 19 avril 1944 :

Le cuirassé Richelieu participe au bombardement de Sabang, base japonaise en Indonésie. Le navire français, ayant rejoint l’Eastern Fleet commandée par l’amiral britannique Somerville, prendra part à trois autres opérations visant des bases navales ennemies. Après 52 mois passés en mer, le bâtiment rentre à Toulon le 1er octobre 1944. À nouveau déployé en Asie du Sud-Est l’année suivante, le bâtiment assistera à la capitulation du Japon dans la rade de Singapour le 23 septembre 1945.





21 avril 2012

Les noms des BPC sont-ils adaptés aux capacités des navires ?

© Les écoles de Saint-Cyr Coëtquidan 2012.

 Un lecteur me fait superbement remarquer qu'il y a peut être matière à débattre de la pertinence des noms qui ont été donnés aux deux premiers BPC.
Il va sans dire que c'est un lourd débat car il n'est pas courant (quel doux et heureux euphémisme) de débaptiser des navires de la Royale pour les rebaptiser. Cela arrive assez régulièrement que les noms changent avant même que la quille ne soit posée. Mais depuis le changement d'appellation du croiseur porte-hélicoptères La Résolue pour Jeanne d'Arc, aucun autre changement de nom ne s'est produit depuis la fin de la seconde guerre mondiale dans la Marine nationale (selon mes humbles connaissances). Mais est-ce vraiment un problème, finalement, puisque une fois n'est pas coutume ? Pis, ces navires n'ont navigué que pendant quelques années avec leurs noms initiaux (comme La Résolue).

Avant toute chose, présentons un peu le potentiel de ces navires de 21 500 tonnes pour 199m de long qui sont capables d'embarquer soit :
  • 450 hommes (900 pendant une "courte" période) de troupes. Ce contingent peut être accompagné d'une large dotation de véhicules et de blindés (dont une compagnie de Leclerc).
  • soit un groupe aéromobile : 700 hommes, en comptant l'équipage1 (configuration du Tonnerre au large de la Libye), pour mettre en oeuvre les voilures tournantes.  A l'heure actuelle, seule l'USMC, la Royal Navy et la Marine nationale embarquent des hélicoptères de combat sur leurs bâtiments amphibies. 
  • Il est certainement possible de choisir des configurations intermédiaires.
  • En complément, le navire dispose d'un hôpital embarqué, ainsi que de moyens de commandement.
Les BPC peuvent mettre en oeuvre 16 hélicoptères "lourds" (NH90 et Tigre) ou bien une trentaine de voilures tournantes en comptant un panachage d'hélicoptères légers (comme les Gazelle).

Les navires de la classe Mistral ont fait la démonstration qu'ils étaient :
  • de véritables unités de commandement. Ils sont reconnus comme tel dans l'OTAN, et ils sont les seuls navires européens, en compagnie de leurs homologues de l'US Navy2 ;
  • des navires amphibies : ils ont régulièrement fait la démonstration de leurs capacités à mettre en oeuvre une battellerie depuis leur radier, et que celle-ci soit composée d'EDA-R ou de LCAC de l'US Navy. La plus éclatante démonstration de ces capacités a été la participation du Tonnerre au grand exercie aéronavale et amphibie américain Bold Alligator ;
  • des unités d'assaut aéroamphibie : au cours de la Guerre en Libye, les équipages des Tonnerre et Mistral ont montré leur capacité à servir de navire de commandement, et à mettre en oeuvre un groupe aéromobile pour mener des assaut contre la terre. L'hôpital embarqué n'était pas dénué d'intérêt dans un tel rôle ;
  • des navires humanitaires : lors de la crise du Liban de 2006, le Mistral embarqua jusque 4000 personnes à son bord ;
  • des bases mobiles, ou éléments d'une sorte de Sea Basing français : le Tonnerre servi à merveille au large de la Côte d'Ivoire pendant la mission Corymbe pendant la crise qui aboutit au renversement du président Gbagbo (à l'instar des TCD qui servirent dans cette mission).
Mais les importants volumes de ces navires, le pont d'envol et le radier permettent d'imaginer d'éventuels futurs rôles :
  • navire-atelier auxiliaire : le navire a les qualités nautiques et les volumes nécessaires, voir même les installations électriques requises ;
  • navire-base du groupe de guerre des mines : ce serait la conséquence directe de la possibilité de faire des BPC un navire-atelier, et vice-versa. Il s'agirait d'étudier l'embarquement des drones de surface (du programme ESPADON) du SLAMF. Ainsi, en plus d'allonger la capacité à durer à la mer des futurs chasseurs de mines, le BPC pourrait apporter des moyens supplémentaires (humains et matériels) pour traiter les menaces ;
  • base mobile renforcée : à l'image des Marine Expedionary Force Foward, les BPC pourraient embarquer un détachement aéromobile avec ses troupes pour prépositionner des forces dans une région. Ce serait utiliser nos navires comme les LHD et LPD américains (mais à travers un seul BPC). Le Dixmude, actuellement en mission Jeanne d'Arc, présente une configuration intéressante pour ce concept de forces prépositionnées. Dans ce registre d'idées, il est également envisageable d'envisager le BPC comme une sorte de base aéronavale mobile. Par exemple, le navire pourrait mettre en oeuvre aéronefs (drones et hélicoptères) et la drome nécessaire pour tenter d'enrayer le phénomène de la piraterie au large du Nigéria ou de la Somalie ;
  • porte-aéronefs auxiliaire : l'éventuel embarquement de drones MALE ou d'UCAV ouvrirait de nouveaux horizons. Si jamais le danger sous-marin devait s'accroître, alors un attelage composé d'une frégate FREMM en version ASM et d'un BPC richement doté en  voilure tournante de lutte ASM constituerait une menace non-négligeable pour tout les vaisseaux noirs. 
Entre les capacités démontrées, et les capacités que l'on peut imaginer, il y a de quoi observer que les BPC rempliront bien des missions pour la Marine nationale dans les trente prochaines années.

Dès lors, pour en revenir au sujet initial, est-ce que les noms des deux premières unités rendent-ils compte de leur potentiel, et des ambitions que l'on pourrait avoir à travers ces navires ? Il était courrant de donner des noms de vent et autre phénomène météorologique intéressant aux navires amphibies, certes. Mais, Mistral ne renvoie pas une filiation de premier plan : les anciens navires à avoir porté ce nom n'étaient pas des unités de première importance. En ce qui concerne le Tonnerre, c'est à peine mieux. En plus, ce n'était pas des noms d'unités amphibies.

Le Dixmude inaugure une filiation historique plus intéressante : un grand dirigeable a porté ce nom dans la Marine, et ce, en l'honneur des combats des fusiliers-marins. Un porte-avions a porté ce nom, et c'était un navire de second rang ! Ce nom de baptême est taillé sur mesure pour ce navire ! Entre les BPC 1 et 2, et le troisième, il y en a un qui a un patrimoine plus adéquat avec les capacités actuelles du navire.

Les BPC ne seront jamais ni les deux TCD Foudre, ni les autres TCD. Ils sont bien plus que des navires amphibies : porte-aéronefs, navires de commandement, porte-hélicoptère d'assaut, porteurs de forces prépositionnées, etc...

Au final, et pour rendre justice aux capacités de nos BPC (comme le dit si bien le lecteur en question) il aurait été terriblement plus indiqué de nommer les deux premiers BPC : Arromanches, Béarn, Bois Belleau, Commandant Teste ou Jeanne d'Arc !

Ces noms évoquent des navires aux ambitions mondiales (et même une ambassade flottante, concept français presque unique au monde !), des navires qui ont combattu comme des porte-aéronefs d'assaut aéroamphibie au large de l'Indochine ou lors de la crise de Suez, ainsi que des navires pionniers dans l'aéronavale ! Ces nom-là correspondent peut être mieux aux nouvelles ambitions qui seront portées par leurs utilisateurs, grâce aux capacités intrinsèques de ces navires. Ce serait envoyer un message bien plus compréhensible au monde entier.

En outre, ce serait appuyer le caractère mondiale de notre marine. Cette mise en relief ne serait pas inutile car la Marine nationale est la seconde marine militaire au monde par sa capacité à se projeter, à durer à la mer, et à savoir utiliser sa puissance, tant de manière "douce" ou "forte", nonobstant les illusions du tonnage ! Pour entretenir un tel outil, il faut des crédits budgétaires, et démontrer qu'ils sont utilisés à bon escient avec la Marine nationale. Qui plus, ce serait rendre hommage aux capacités expéditionnaires de nos forces (qui sont bien utiles quand le monde politique appelle à agir en Libye ou en Syrie).
Il y a la dissuasion nucléaire, certes, mais il y aussi le groupe aéronaval et le groupe amphibie, ces deux groupes étant cités dans le Livre blanc.

Enfin, le BPC porte peut être en lui une certaine idée de la "transformation" des forces françaises, au croisement de la Marine macrocéphale et d'une sorte de Sea Basing.

Le quatrième BPC confirmera-t-il le virage initié par le Dixmude ?

1 Précision du Capitaine de Vaisseau Ebanga, ancien commandant du Tonnerre, lors de la conférence "Dans le vent d'Harmattan, agir pour la Marine de demain" du 3 avril 2012.
2 "Les LHD français ont aussi été d'emblée conçus comme des Bâtiments de Projection et de Commandement (BPC) et disposent d'installations spécifiques à bord, telles qu'ils sont considérés au sein de l'OTAN comme les seuls vrais navires de commandement avec les LCC américains", "Les fondements de la stratégie navale au XXIe siècle" de Joseph Henrotin, aux éditions Economica, p.160 et 161, et note de base de page : "Véronique Sartini, "NRF. La Marine nationale est d'alerte", Défense et Sécurité Internationale, n°34, février 2008".

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